Bonjour, j'ai un exercice de trois questions à rendre sur les répétitions d'Hernani, de Victor Hugo, et je bloque un peu, pourriez vous m'aider s'il vous plaît ?
Questions :
1 - Pourquoi Mlle Mars ne veut elle pas dire le vers qui a été écrit ? 2 - Que révèle ce dialogue sur les relations entre auteur et interprète ? 3 - Expliquer la dernière remarque.
Aidez moi s'il vous plaît, il me faut des réponses construites.
ALEXANDRE DUMAS / MEMOIRES
Dans ses Mémoires, Alexandre Dumas raconte plaisamment les déboires de Victor Hugo avec Melle Mars, tragédienne émérite mais peu favorable à la « révolution romantique », pendant les répétitions d’Hernani.
Les choses se passaient à peu près ainsi : Au milieu de la répétition, Mlle Mars s'arrêtait tout à coup.
«Pardon, mon ami, disait-elle à Firmin, à Michelot ou à Joanny, j'ai un mot à dire à l'auteur. »
L'acteur auquel elle s'adressait faisait un signe d'assentiment, et demeurait muet et immobile à sa place. Mlle Mars s'avançait jusque sur la rampe, mettait la main sur ses yeux, et, quoiqu'elle sût très bien à quel endroit de l'orchestre se trouvait l'auteur, elle faisait semblant de le chercher. C'était sa petite mise en scène, à elle.
« Monsieur Hugo ? demandait-elle, monsieur Hugo est-il là ? - Me voici, madame, répondait Hugo en se levant. - Eh! très bien! merci... Dites-moi, monsieur Hugo... - Madame ? - J'ai à dire ce vers-là
Vous êtes mon lion superbe et généreux!
- Oui, madame: Hernani vous dit:
Hélas! j'aime pourtant d'une amour bien profonde! Ne pleure pas... Mourons plutôt! Que n'ai-je un monde. Je te le donnerais! Je suis bien malheureux!
et vous lui répondez:
Vous êtes mon lion superbe et généreux!
- Est-ce que vous aimez cela, monsieur Hugo ? - Quoi ? - Vous êtes mon lion ! ... - Je l'ai écrit ainsi, madame ; donc, j'ai cru que c'était bien. - Alors, vous y tenez, à votre lion ? - J’y tiens et je n'y tiens pas, madame ; trouvez-moi quelque chose de mieux, et je mettrai cette autre chose à la place. - Ce n'est pas à moi à trouver cela; je ne suis pas l'auteur, moi. - Eh bien, alors, madame, puisqu'il en est ainsi, laissons tout uniment ce qui est écrit. - C'est qu'en vérité, cela me semble si drôle d'appeler M. Firmin mon lion! - Ah! parce qu'en jouant le rôle de Doña Sol, vous voulez rester Mlle Mars; si vous étiez vraiment la pupille de Ruy Gomez de Silva, c'est-à-dire une noble Castillane du XVIe siècle, vous ne verriez pas dans Hernani M. Firmin; vous y verriez un de ces terribles chefs de bande qui faisaient trembler Charles Quint jusque dans sa capitale; alors, vous comprendriez qu'une telle femme peut appeler un tel homme son lion, et cela vous semblerait moins drôle. - C'est bien! puisque vous tenez à votre lion, n'en parlons plus. Je suis ici pour dire ce qui est écrit; il y a dans le manuscrit: « Mon lion! » je dirai « Mon lion! » Moi... Mon Dieu! cela m'est bien égal! - Allons, Firmin!
Vous êtes mon lion superbe et généreux!
Et la répétition continuait.
Seulement, le lendemain, arrivée au même endroit, Mlle Mars s'arrêtait comme la veille; comme la veille, elle s'avançait sur la rampe; comme la veille, elle mettait la main sur ses yeux ; comme la veille, elle faisait semblant de chercher l'auteur.
« M. Hugo, disait-elle de sa voix sèche, de sa voix à elle: de la voix de Mlle Mars, et non pas de Célimène. M. Hugo est-il là? - Me voici, madame, répondait Hugo avec sa même placidité. - Ah! tant mieux! Je suis bien aise que vous soyez là. - Madame, j'avais eu l'honneur de vous présenter mes hommages avant la répétition. - C'est vrai... Eh bien, avez-vous réfléchi ? - A quoi, madame? - A ce que je vous ai dit hier. - Hier, vous m'avez fait l'honneur de me dire beaucoup de choses. - Oui, vous avez raison... Mais je veux parler de ce fameux hémistiche. - Lequel? - Eh! mon Dieu, vous savez bien lequel! - Je vous jure que non, madame, vous me faites tant de bonnes et justes observations, que je confonds les unes avec les autres. - Je parle de l'hémistiche du lion... - Ah! oui: Vous êtes mon lion!je me rappelle... - Eh bien, avez-vous trouvé un autre hémistiche ? - Je vous avoue que je n'en ai pas cherché. - Vous ne trouvez pas cet hémistiche dangereux ? - Qu'appelez-vous dangereux ? - J'appelle dangereux ce qui peut être sifflé. - Je n'ai jamais eu la prétention de ne pas être sifflé. - Soit, mais il faut être sifflé le moins possible. - Vous croyez donc qu'on sifflera l'hémistiche du lion ? - J'en suis sûre ! - Alors, madame, c'est que vous ne le direz pas avec votre talent habituel. - Je le dirai de mon mieux... Cependant, je préférerais... - Quoi ? - Dire autre chose. - Quoi ? - Autre chose, enfin - Quoi ? - Dire, -- et Mlle Mars avait l'air de chercher le mot, que, depuis trois jours, elle mâchait entre ses dents, -- dire, par exemple... heu... heu... heu...
Vous êtes mon seigneur superbe et généreux!
Le vers ne fut ni applaudi ni sifflé; il n'en valait plus la peine.
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