👤

Bonjour, juste savoir les points communs de la misologie dans le Phédon et le lachès. Merci

Répondre :

Bonjour

On peut relever un certain nombre de bornes à la raison, qui montrent assez bien que la raison n'est pas omnipotente. Néanmoins, la principale limite de la raison, la seule qui puisse mener à une véritable haine de celle-ci, c'est notre propre ignorance.

Pour nous faire comprendre cette dernière, Platon développe une intéressante analogie dans Phédon (89d – 90e), il y compare la misologie à la misanthropie, la haine du genre humain. En effet cette dernière est le fruit d'attentes déçues, de confiance trahie, que l'individu généralise à l'ensemble des hommes. Mais il est incapable de se rendre compte que le responsable de cette déception n'est pas le parjure mais bien lui-même, à cause de l'aveuglement avec lequel il a placé sa confiance sans aucune connaissance, et de la généralisation infondée qu'il a réalisé. C'est donc du fait de son manque de connaissances qu'il en vient à haïr le genre humain, et la misologie à la même cause : quand on raisonne sans connaître l'art de raisonner, ou sans avoir suffisamment examiné le raisonnement, on finit par tenir pour vrais des raisonnements qui ne le sont pas et par rejeter cette erreur sur la raison elle-même. Cela conduit donc à une haine de la raison, alors même que l'erreur est ici de notre ressort.

Pour Platon, la misologie a donc pour origine l'incompétence. Il faut donc une véritable formation qui permette de s'élever du sensible illusoire à l'intelligible stable, il fait donc l'éloge de la dialectique du philosophe. Cette dialectique est une combinaison nécessaire de l'intuition et de la raison : sans elle, la raison ne peut reconnaître la vérité, atteindre un savoir. Sans cet apprentissage, on peut être déçu par le discours rationnel, jusqu'à le haïr. Platon juge ce sentiment lamentable, et il accuse implicitement les sophistes qui prônent le relativisme, Protagoras le premier, de ne pas voir qu'ils sont responsables de leurs raisonnements faux. Il accuse les sophistes, qui basent leurs discours sur la rhétorique, de ne pas chercher la vérité, ce qui peut être vu comme une certaine haine de la raison qui provient de leur incompétence dialectique. Comme seul le philosophe peut raisonner justement, le devenir est une véritable réalisation de l'homme. Le misologue s'empêche de lui même d'atteindre cette réalisation ; il est donc en ce sens irrationnel. La misologie est finalement certes lamentable, mais elle est aussi un malheur pour l'homme qui, par elle, s'empêche d'accéder à une transcendance de la réflexion.

Mais voir la misologie comme une méprise ne rend peut être pas compte de tout : elle pourrait être un rejet réfléchi de la raison, qui aurait pour origine l'incapacité de cette dernière à répondre à toutes les attentes de l'homme.